Élu, ancien conseiller politique et désormais Prix Nobel d’économie 2025, Philippe Aghion n’y va pas par quatre chemins : face au contre-budget présenté par le Rassemblement national (RN), il dénonce un programme « irréaliste », porté par des « amateurs ».
Ses critiques s’articulent autour de plusieurs volets du plan budgétaire du parti de Marine Le Pen, allant de l’immigration à la contribution européenne, en passant par les économies sur les opérateurs de l’État.
Le contre-budget du RN et ses promesses d’économies
Le RN a annoncé un contre-budget visant à réaliser 36 milliards d’euros d’économies, via notamment 50 milliards de réduction des dépenses publiques et 14 milliards de recettes supplémentaires. Un volet central concerne l’immigration, avec un objectif d’économies fixé à 12 milliards d’euros, contre 4 milliards l’an précédent. L’ébauche du programme prévoit ainsi la transformation de l’aide médicale de l’État (AME), le conditionnement des prestations de solidarité et la suppression du visa pour soins.
Outre l’immigration, le parti propose de réduire la contribution de la France à l’Union européenne de 8,7 milliards d’euros, une mesure que certains jugent contraire aux traités européens. Un rapport sénatorial évalue pourtant l’économie potentielle liée aux agences et opérateurs de l’État à environ 500 millions d’euros, partant de l’idée ambitieuse d’un rabais de 20 % sur les fonctions support.
Les critiques principales d’Aghion
1. Le manque de crédibilité technique
Philippe Aghion a qualifié les responsables économiques du RN de « grands amateurs » et a déclaré qu’il ne leur confierait pas « les manettes de la France ». Il critique la méthode de chiffrage des économies, en estimant que de nombreuses mesures sont « largement surestimées » et « pas applicables en 2026 ».
2. Le volet immigration jugé irréaliste
L’économiste estime que les économies liées à l’immigration sont non-constitutionnelles et que leur mise en œuvre rapide est improbable. Selon lui, la transformation de l’AME en aide d’urgence et le conditionnement des prestations sociales pour étrangers représentent des effets d’annonce plus que des mesures opérationnelles immédiates.
3. La contribution européenne remise en cause
Le RN propose une forte diminution de la contribution française à l’Union européenne, ce qu’Aghion considère comme incompatible avec les engagements pris par la France et préjudiciable notamment aux secteurs agricoles : « Les premières victimes d’une baisse seraient les agriculteurs ».
4. Les économies « inventées » sur les agences de l’État
Le parti anticipe 7 milliards d’euros d’économies sur les agences et opérateurs de l’État, tandis que le rapport sénatorial évoque un potentiel maximal autour de 500 millions d’euros — soit un rapport d’un facteur 14 à 15. Pour Aghion, cette différence souligne le manque de sérieux dans l’évaluation des mesures.
Pourquoi ce débat est-il crucial ?
Au-delà de la polémique politique, ce désaccord entre un économiste de renom et un programme politique souligne un enjeu plus large : la capacité d’un parti à proposer un projet économique crédible pour l’ensemble du pays. Dans un contexte de fragilité budgétaire, d’inflation persistante et de défiance vis-à-vis des finances publiques, l’écart entre annonces et réalisations peut donc décider de la confiance des marchés et de l’opinion publique.
L’intervention de Philippe Aghion marque un coup de tonnerre dans le débat budgétaire : selon lui, le contre-budget du RN ne repose pas sur une architecture solide.
Et vous ? Que pensez-vous de l’intervention de Philippe Aghion?
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