« Je ne me reconnais plus dans ce pays » : Ces Français qui choisissent de partir pour construire leur avenir ailleurs

De plus en plus de Français font le choix de quitter leur pays. Ce départ ne repose plus seulement sur une opportunité professionnelle. Il traduit aussi un malaise profond. Fiscalité jugée excessive, instabilité politique, climat social tendu. 

Pour beaucoup, l’avenir semble plus lisible ailleurs. Et une fois partis, le retour paraît souvent improbable.

Un déclic familial et personnel

Rien ne prédisposait Jérôme (le prénom a été modifié) à envisager un départ. Pourtant, tout a changé après la naissance de sa fille. À 33 ans, ce cadre financier ne se projette plus dans un pays où il dit ne plus se reconnaître. Il évoque une pression fiscale constante et une classe politique qu’il juge éloignée des réalités.

Peu à peu, l’idée de partir s’est imposée. Le Canada ou l’Australie représentent désormais des options sérieuses. Selon lui, rester aurait été un choix de confort. Partir devient une décision de lucidité.

Une expatriation de plus en plus répandue

Fin 2024, environ 2,5 millions de Français vivaient à l’étranger. Parmi eux, près de 1,7 million étaient inscrits sur les registres consulaires. Les départs ont légèrement augmenté par rapport à l’année précédente.

Cependant, les motivations évoluent. L’expatriation ne répond plus uniquement à une logique de carrière. Elle s’inscrit désormais dans une recherche globale de stabilité, de visibilité et de qualité de vie.

Instabilité politique et manque de projection

Chez certains jeunes actifs, la situation politique a joué un rôle déterminant. Nicolas, 29 ans, avocat d’affaires, cite la dissolution de l’Assemblée nationale comme un tournant. Il explique ne plus réussir à se projeter à moyen terme.

En parallèle, l’accès au logement et l’incertitude économique s’ajoutent au doute. Ces facteurs poussent de nombreux diplômés à regarder vers la Suisse, Singapour ou l’Amérique du Nord.

La fuite des talents inquiète

Chaque année, une part significative des jeunes diplômés quitte la France. Les écoles d’ingénieurs et de commerce sont particulièrement concernées. En dix ans, ces départs ont fortement augmenté.

Les raisons reviennent souvent. Des salaires nets jugés trop faibles. Une fiscalité ressentie comme dissuasive. À terme, ce phénomène pourrait affaiblir durablement l’attractivité économique du pays.

L’entrepreneuriat freiné par le cadre français

Pour Jérôme et son épouse, les lourdeurs administratives ont aussi pesé. Ils ont renoncé à reprendre les entreprises familiales. Ils ont observé leurs parents consacrer leur énergie à leurs sociétés sans réelle reconnaissance.

Cette expérience a nourri un profond découragement. Le discours opposant dirigeants et salariés leur paraît stérile. Ils estiment que les efforts demandés ne trouvent plus d’équivalent dans ce que le pays offre en retour.

Un climat social qui pousse au départ

La tension sociale constitue un autre facteur clé. Romain, 38 ans, salarié dans le secteur bancaire, aspire avant tout à la tranquillité. Il prépare son installation en Pologne et apprend déjà la langue.

Il recherche un cadre plus paisible et plus prévisible. Pour lui, le sentiment d’unité nationale s’est affaibli et cela pèse au quotidien.

L’appel des écosystèmes dynamiques

Ce constat touche aussi les entrepreneurs. Certains estiment que l’environnement freine l’innovation. Ils choisissent alors de s’installer dans des zones où les idées circulent plus librement.

San Francisco illustre cette attractivité. Là-bas, le risque est encouragé et l’ambition valorisée. Pour ces profils, la géographie devient un levier décisif de réussite.

Un retour de plus en plus incertain

Une fois à l’étranger, peu envisagent un retour rapide. Marion, ingénieure de 28 ans installée en Australie, pensait rentrer après quelques mois. Aujourd’hui, elle doute.
La qualité de vie et la stabilité locale contrastent avec la situation française.

Comme beaucoup d’expatriés, elle observe à distance et hésite à revenir. Le sentiment dominant reste clair. L’herbe ne semble plus verte ailleurs par hasard.

Quitter la France n’est plus un choix marginal. Pour de nombreux actifs, il s’agit d’une réponse rationnelle à un contexte jugé anxiogène. Fiscalité, politique, climat social. Tous ces éléments s’additionnent.

Pour ceux qui partent, l’essentiel reste de retrouver de la clarté et de l’espoir. Et tant que ces repères manqueront, le retour restera une option lointaine.

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