De plus en plus d’hommes assument aujourd’hui leur désir de devenir père sans partenaire. Ils franchissent ce pas autour de la trentaine ou de la quarantaine et choisissent d’élever un enfant seul.
Ce choix reste rare, mais il prend de l’ampleur et révèle une nouvelle manière de penser la paternité.
Le parcours de Marouane
Marouane a trente neuf ans. Chaque matin, il se lève avant l’aube pour préparer le premier biberon de son bébé de quatre mois. Dans un café de l’est parisien, il sourit en regardant son enfant dormir dans une poussette verte.
Il explique avoir toujours voulu devenir père. Pourtant, aucune de ses relations amoureuses ne partageait ce désir.
Après de longues années d’attente et beaucoup de réflexion, il décide de se lancer seul. Il part alors au Mexique, où son enfant est conçu grâce à une gestation pour autrui.
Pour se préparer, il consulte un psychologue et réfléchit longuement à la manière dont il souhaite transmettre ses valeurs.
Une paternité solo qui s organise
Marouane n’est pas seul dans cette démarche. À l’APGL, association qui regroupe des parents gays et lesbiens, il a créé un groupe de discussion dédié aux pères solos.
Plus de soixante-dix hommes y échangent des conseils. Ils organisent aussi des rencontres et des week-ends réservés aux pères célibataires. La plupart ont entre trente cinq et quarante cinq ans et ont choisi librement ce modèle familial.
Selon l’association Clara, qui défend les enfants nés par gestation pour autrui, une petite partie des demandes qu’elle reçoit provient aussi d’hommes seuls.
Adopter, un chemin trop long
Pour beaucoup, l’adoption apparaît comme une voie trop incertaine et trop longue. Marouane l’affirme clairement. Il ne souhaitait pas attendre dix ans.
De plus, plusieurs homosexuels avaient tenté l’adoption dans les années quatre vingt et quatre vingt dix et s’étaient heurtés à des refus en raison de leur orientation sexuelle.
Ce contexte explique en partie pourquoi certains hommes gays se tournent aujourd’hui vers des solutions à l’étranger.
Le regard des autres
Au quotidien, Marouane doit encore répondre à des remarques. À la crèche ou à la protection maternelle et infantile, on lui demande parfois si la maman va bien.
Il répond toujours avec calme. « Mon fils a un super papa et c’est moi ».
Cette réponse suffit en général à clore la discussion.
Un mode de vie complètement transformé
Cette vie de parent solo demande une organisation stricte.
Marouane décrit des journées rythmées par le travail, la crèche et les soins. Le soir, il rouvre souvent son ordinateur après avoir couché son fils.
Son cercle d’amis change aussi. On l’invite moins car on pense qu’il ne peut pas venir.
Mathieu Ceschin, ancien participant de L’Amour est dans le pré, partage cette vision. Père solo d’un petit garçon depuis dix huit mois, il élève son enfant sans aide extérieure. Il affirme avoir découvert une patience nouvelle et une implication totale.
Une nouvelle manière de vivre la paternité
Pour plusieurs sociologues, ce mouvement reflète une transformation profonde du rôle du père.
Selon Christine Castelain Meunier, du CNRS, la paternité devient plus relationnelle et plus engagée. Elle n’est plus perçue comme une simple fonction mais comme un domaine où l’homme affirme son identité.
Elle remarque aussi que ces hommes veulent vivre leur rôle de père avec tranquillité et autonomie.
Des obstacles qui rappellent ceux des mères
Malgré cette volonté affichée, ces pères ne sont pas épargnés par certaines discriminations. Marouane raconte qu’en quittant son bureau pour aller chercher son fils, il croise parfois des regards méprisants.
Il découvre ainsi ce que vivent de nombreuses mères. Il prévoit d’en parler ouvertement un jour, car ces réactions l’indignent.
La paternité solo choisie reste encore marginale. Pourtant, elle illustre une évolution forte des modèles familiaux.
Ces hommes suivent un désir profond. Ils construisent une parentalité engagée et réfléchie.
Ce mouvement reflète aussi une redéfinition de la place du père dans la société. Et pour beaucoup d’entre eux, il s’agit avant tout de vivre pleinement une envie ancienne, sans attendre que les circonstances amoureux s’alignent.
LIRE AUSSI : Mise en examen d’un adolescent de 13 ans après le viol filmé d’un enfant de 9 ans à Besançon
LIRE AUSSI : Suppression à venir de la réduction d’impôt pour frais de scolarité : ce qu’il faut savoir