« Sortir de ce blocage » : pourquoi Alexandra Martin, seule députée LR à avoir voté les deux motions de censure, explique son choix

Le jeudi 16 octobre 2025, deux motions de censure ont été déposées à l’Assemblée nationale contre le gouvernement de Sébastien Lecornu.

Bien que rejetées, elles ont entraîné un mouvement notable : parmi les 50 députés du groupe Les Républicains (LR), seule Alexandra Martin, élue de la 8ᵉ circonscription des Alpes‑Maritimes, a voté pour les deux textes. Elle explique un choix qu’elle qualifie de « vote de témoignage », motivé selon elle par la nécessité d’un « retour aux urnes dans l’esprit et l’ordre de la Ve République ».

Cet article explore son profil, les motifs de son vote, ainsi que les conséquences politiques de cette dissidence annoncée.

Qui est Alexandra Martin ?

Parcours et ancrage local

Alexandra Martin est députée depuis juin 2022 pour la 8ᵉ circonscription des Alpes‑Maritimes (Cannes et environs). Dès ses débuts, elle a travaillé aux côtés de David Lisnard, maire de Cannes, et cofondé avec lui le mouvement « Nouvelle Énergie », qu’elle préside au sein de la droite locale.
Elle se présente comme appartenant à une droite libérale « républicaine », centrée sur des thèmes comme la sécurité, la maîtrise de l’immigration, la baisse des impôts et un État recentré sur ses missions.

Positionnement dans son parti

Au sein de LR, elle se réclame d’une ligne plus « libérale et de terrain », parfois éloignée des consignes du groupe. Elle dit être « en phase » avec Bruno Retailleau pour ce qui est de la colonne vertébrale politique, mais elle assume aussi ses différences avec la direction du groupe sur certaines décisions.
Ainsi, son choix de voter les motions de censure s’inscrit dans cette logique d’indépendance assumée.

Le vote des deux motions de censure

Les faits

Le 16 octobre 2025, l’Assemblée nationale a rejeté deux motions de censure :

  • celle déposée par La France insoumise (LFI) contre le gouvernement : 271 voix pour, 289 nécessaires à la chute du gouvernement.
  • celle déposée par le Rassemblement national (RN) et l’Union des droites pour la République (UDR) : 144 voix pour.

Dans le groupe LR, seule Alexandra Martin a voté en faveur de ces deux motions. Deux autres députés LR (François‑Xavier Ceccoli et Pierre Cordier) n’ont voté que pour la motion RN/UDR. 

Ses motifs dévoilés

Lors d’une intervention à la sortie de l’hémicycle, elle explique :

« Je n’en tire aucune gloire. J’ai voulu exprimer par ces votes la nécessité de sortir de ce blocage par un retour aux urnes, mais dans l’esprit et dans l’ordre de la Ve République. C’est‑à‑dire d’abord une élection présidentielle, ensuite une élection législative. » 

Elle pointe également un désaccord sur le budget proposé par le gouvernement :

  • Ce budget, selon elle, « est entre les mains des socialistes » et va « aggraver la fiscalité ».
  • Elle dénonce « la frénésie fiscale » et l’absence de lutte contre « l’assistanat, le coût social et économique de l’immigration ».

Enfin, elle appelle à une clarification de la droite républicaine :

« Notre devoir aujourd’hui est de construire une alternative crédible et ne pas en laisser le monopole au RN et à LFI. » 

Pourquoi ce choix est‑il significatif ?

Une rupture symbolique

Le vote de Martin marque une rupture claire avec la discipline de groupe chez LR. En effet, la consigne des Républicains était de ne pas voter la censure.
Son choix met en lumière une tension interne : entre une droite plus traditionnelle et une droite qui revendique davantage d’indépendance vis‑à‑vis de l’exécutif.

Une critique adressée à l’exécutif

Son vote traduit aussi une critique directe du gouvernement et de l’Élysée : elle réclame la démission anticipée du président de la République et un retour aux urnes.
Dans un contexte où les réformes (retraites, fiscalité…) sont au cœur des débats, cette posture vise à présenter une alternative claire.

Enjeu pour l’avenir de la droite

En appelant à un regroupement « autour d’hommes et de femmes politiques qui ont les valeurs de la droite républicaine », elle cherche à impulser une recomposition. Elle mentionne notamment Sarah Knafo, Hervé Morin et ne ferme pas la porte à Marion Maréchal.
Cela pose la question d’une éventuelle scission ou transformation du paysage de la droite française.

Les enjeux à venir

Impact local et national

Au niveau local (Alpes‑Maritimes), cette dissidence pourrait provoquer des remous au sein de la fédération LR, alors que le territoire concentre différentes sensibilités de droite. Sobrement, Alexandra Martin évoque « un gros travail de clarification ».
Au niveau national, son action pourrait encourager d’autres élus à sortir des cadres habituels, ou au contraire renforcer la discipline de groupe.

L’équilibre du pouvoir parlementaire

Même si les motions de censure ont été rejetées, l’érosion de la majorité gouvernementale reste un signal politique fort. Le fait que seuls 271 voix aient pu être rassemblées pour la motion de LFI — malgré une forte opposition — montre une situation instable.
Dans ce contexte, l’attitude de députés issus de la majorité ou des groupes alliés pourrait devenir un levier de pression.

Une question de crédibilité pour LR

En votant la censure, Alexandra Martin mise sur la cohérence vis‑à‑vis de ses électeurs. Elle affirme que ne pas le faire aurait été une « trahison ».
Pour LR, la question se pose : être une opposition constructive ou un soutien critique à l’exécutif. Le positionnement que prendra le parti dans les mois à venir pourrait déterminer sa trajectoire électorale.

Le geste d’Alexandra Martin — unique députée LR à avoir voté pour les deux motions de censure contre le gouvernement — n’est pas un simple écart de discipline. Il traduit un malaise à droite : vis‑à‑vis d’un gouvernement jugé trop mou en matière fiscale, d’immigration ou d’autorité, et vis‑à‑vis d’un parti qui oscille entre soutien et opposition.

Son choix pose des questions : celle de la cohérence vis‑à‑vis des électeurs, de la stratégie de la droite française, et des marges de manœuvre parlementaire de l’exécutif. Quel que soit le jugement que l’on porte sur ce choix, il marque un moment politique significatif dans la recomposition de la droite républicaine.
L’avenir dira si cette prise de position restera un cas isolé ou préfigure une tendance plus large.

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